Page:Focillon - L’Art bouddhique.djvu/102

Cette page a été validée par deux contributeurs.

humain, bien bâti, concret. Dans le domaine de l’iconographie religieuse, naguère encore toute linéaire, il installe avec maîtrise l’autorité de la troisième dimension.

Par là la sculpture indienne cesse d’être exclusivement décorative, elle tend à devenir un art complet et qui se suffit. Du simple relief, elle passe peu à peu à la statuaire proprement dite, enfin elle crée des statues détachées. Au-dessus des rêves de l’Asie, elle dresse l’extraordinaire image du Bouddha, à laquelle semble avoir collaboré le double génie de deux continents.

Rarement il est debout, car le Bouddha ne se lève devant personne, ou bien c’est qu’il est en marche, ou encore sa statue se dresse miraculeusement devant sa personne, pour l’honorer. Le plus souvent il est assis à l’indienne sur un lotus épanoui[1], la plante des pieds retournée et la jambe droite repliée en avant, tandis que les autres divinités assises la laissent pendre à terre. Le type du Gautama ascétique (Pl. XIII) le représente les mains croisées dans une attitude de patience et de réflexion, les joues émaciées par le jeûne, les articulations et les côtes saillantes : la vérité anatomique de l’épuisement et de la maigreur est exprimée avec un réalisme accentué. C’est à ce type que se rattache vraisemblablement le Çakya revenant des mon-

  1. Le lotus, emblème de la pureté, par l’éclat et la fraîcheur de ses pétales, est aussi l’emblème de la fécondité, parce que l’eau d’où il s’élève est, par excellence, un principe de vie.