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en état de briser la volonté des peuples, en semant la terreur dans les pays envahis, par des procédés que les nécessités de la guerre seraient censées justifier ? Un mot d’ordre, « c’est la guerre », dans la bouche du général comme dans celle du soldat, n’allait-il pas légitimer les plus inutiles atrocités et les plus violentes atteintes aux droits de l’humanité ? Une fois de plus, la victoire, qui devait justifier tous les procédés et régler tous les différends, était certaine au prix d’une offensive immédiate et audacieuse, dégagée de tout scrupule, dût-elle même étendre et redoubler les rigueurs de la guerre sur des populations inoffensives. Il n’y avait qu’à marcher résolument et rapidement, en se faisant précéder de la terreur et accompagner de la dévastation.

La lutte qui allait s’engager trouvait l’armée française dans le même état moral que la nation entière. Cette armée de la République, reconstituée au lendemain de nos désastres de 1870, la première qui ait connu le service personnel obligatoire, avait produit un extraordinaire effort de régénération. Si, au cours de cette période de temps, la nation avait affirmé, par ses sacrifices, sa volonté de vivre et de tenir son rang en Europe, l’armée, dans un admirable labeur, avait recherché avec acharnement la manière de résister victorieusement à une nouvelle agression de son puissant voisin. Elle poursuivait pour cela l’étude et la préparation de la grande guerre, dont la notion avait été perdue par l’armée impériale ainsi qu’en témoignaient deux désastres sans précédent :