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SUCCESSION DES ÊTRES

Leibnitz est arrivé à la même conception que Descartes, mais par une voie toute différente, par l’observation.

Les matières fondues et, comme il s’exprime, vitrifiées, que présente le globe, lui avaient donné l’idée d’un incendie primitif et général. Dans son traité intitulé : Protogæa[1], il nous dit que la terre et les autres planètes étaient, dans le principe, des étoiles lumineuses par elles-mêmes. Après avoir brûlé longtemps, elles se sont éteintes, faute de matière combustible, et

    sa Théorie des tourbillons, sa Pluralité des mondes, etc. Au xviiie siècle, Voltaire s’en moqua. Voyez Dialogues d’Évhémère : « Évhémère : Cardestes (Descartes) a deviné que notre nid a été d’abord un soleil encroûté. — Callicrate : Un soleil encroûté ! Vous voulez rire. — Évhémère : C’est ce Cardestes sans doute qui riait quand il disait que nous avons été autrefois un soleil composé de matière subtile et de matière globuleuse, mais que, nos matières s’étant épaissies, nous avons perdu notre brillant et notre force : nous sommes tombés, d’un tourbillon dont nous étions le centre et les maîtres, dans le tourbillon du soleil d’aujourd’hui ; nous sommes tout couverts de matière rameuse et cannelée ; enfin, d’astres que nous étions, nous sommes devenus lune, ayant par faveur autour de nous une autre petite lune pour nous consoler dans notre disgrâce. »

  1. La Protogæa parut, pour la première fois, en 1682, dans les Actes de Leipzig. M. Bertrand de Saint-Germain vient d’en donner une traduction française.