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FLORIAN ET SON ŒUVRE

Jean-Pierre de Claris de Florian naquit à Sauve, dans le Gard, le 6 mars 1755, d’une famille noble et vouée à la carrière des armes. Sa mère, d’origine espagnole, s’appelait Gilles Salgues ; douce, belle, d’esprit cultivé, elle mourut peu de temps après son mariage, en donnant le jour à un second fils, le frère de Florian.

Le père se montra inconsolable de la perte d’une compagne qu’il aimait très tendrement ; il fit vœu de ne pas se remarier et se consacra tout entier à l’éducation de ses enfants et au rétablissement d’une fortune très compromise.

Le grand-père de Florian, conseiller à la cour de Montpellier, possesseur d’un patrimoine considérable, s’était presque entièrement ruiné de toutes les manières, en aventures galantes, en interminables procès, à l’aide des maçons principalement, en faisant construire un château magnifique, le château de Florian, situé dans le Bas-Languedoc, à 15 kilomètres d’Anduze, dans la commune de Logrian, canton de Sauve[1]. Ce fut le poète qui, plus tard, avec le prix de ses ouvrages si goûtés, paya toutes les dettes de cet aïeul dissipateur qui l’avait entouré d’affection et en faisait le compagnon de ses courses champêtres.

Son père l’avait envoyé quelque temps en pension ; mais quand il eut neuf ans il le garda près de lui au château.

«  Mon père, dit notre fabuliste, me destinait au service, aimait à me voir manier un fusil ; il me donnait de la poudre et du plomb. Je courais les champs tout seul, tuant fort bien les moineaux, et le soir je revenais au château rapporter ma chasse et lire quelque livre. Celui qui me plaisait le plus était la traduction de l’Iliade d’Homère ; les exploits des héros grecs me transportaient, et lorsque j’avais tiré un oiseau un peu remarquable par son plumage ou par sa grosseur, je ne manquais pas de former un bûcher avec du bois sec au milieu de la cour ; j’y déposais avec respect le corps de Patrocle ou de Sarpédon.  »

Le père de notre chasseur était d’esprit assez ordinaire et l’éducation de l’enfant aurait été sans doute assez négligée sans l’intervention d’un oncle qui, après avoir servi avec son frère dans la cavalerie, vendit sa Compagnie pour épouser une femme à laquelle il était attaché depuis plusieurs années.

« Grande, bien faite, assez bien de figure, ma tante portait dans ses yeux tout l’esprit qu’elle avait et personne n’en eut un plus juste et

  1. Brûlé pendant les guerres de religion, ce château, reconstruit sous Louis XV, a changé deux fois de maître après la vente consentie par Florian ; des réparations considérables en ont modifié le caractère. (Vie de Florian, par A. de Montvaillant.)