Page:Florian - Fables, illustrations Adam, 1838.djvu/36

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
XXIV
essai

me borne à regarder comme à peu près sûr que ce prétendu Ésope n’est qu’un nom supposé sous lequel on répandit dans la Grèce des apologues connus longtemps auparavant dans l’Orient. Tout nous vient de l’Orient ; et c’est la fable, sans aucun doute, qui a le plus conservé du caractère et de la tournure de l’esprit asiatique. Ce goût de paraboles, d’énigmes, cette habitude de parler toujours par images, d’envelopper les préceptes d’un voile qui semble les conserver, durent encore en Asie ; leurs poètes, leurs philosophes, n’ont jamais écrit autrement.

— Oui, lui dis-je, je suis de votre avis sur ce point ; mais quel est le pays de l’Asie que vous regardez comme le berceau de la fable ?

— Là-dessus, me répondit-il, je me suis fait un petit système qui pourrait bien n’être pas plus vrai que tant d’autres ; mais comme c’est peu important, je ne m’en suis pas refusé le plaisir. Voici mes idées sur l’origine de la fable ; je ne les dis guère qu’à mes amis, parce qu’il n’y a pas grand inconvénient à se tromper avec eux.

« Nulle part on n’a dû s’occuper davantage des animaux que chez le peuple où la métempsycose était un dogme reçu. Dès qu’on a pu croire que notre âme passait après notre mort dans le corps de quelque animal, on n’a rien eu de mieux à faire, rien de plus raisonnable, rien de plus conséquent, que d’étudier avec soin les mœurs, les habitudes, la façon de vivre de ces animaux si intéressants, puisqu’ils étaient à la fois pour l’homme l’avenir et le passé, puisqu’on voyait toujours en eux ses pères, ses enfants et soi-même.

« De l’étude des animaux, de la certitude qu’ils ont notre âme, on a dû passer aisément à la croyance qu’ils ont un langage. Certaines espèces d’oiseaux l’indiquent même sans cela. Les étourneaux, les perdrix, les pigeons, les hirondelles, les corbeaux, les grues, les poules, une foule d’autres, ne