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RICHE OU AIMÉE ?

charmante ; non seulement parce qu’elle était jolie, et portait tout cela à merveille, mais encore parce qu’elle avait l’art de savoir choisir ses ajustements. Oh ! elle avait de la race jusqu’au bout des ongles, celle-là ! M. d’Azas, qui le constatait, lui en savait gré et le lui témoignait aussi par son amabilité, si bien que, souvent, la comtesse faisait proposer à Gisèle de l’accompagner dans une promenade, une visite, éludant autant que possible la compagnie de Mme de Lacourselle. Et celle-ci, par un raffinement d’adresse, ne comprenant ou ne voulant pas comprendre l’exclusion, disait sans qu’on l’ait consultée :

— Allez, fillette, avec votre cousine, c’est de votre âge ; moi, je reste avec ma sœur de Vauteur.

Et de fait, sa sœur de Vauteur, ne se souciant pas toujours de l’avoir toute une journée sur les bras, prétextait quelque occupation ; alors l’excellente femme se retirait dans sa chambre, ou se promenait dans le parc, heureuse de la joie de sa fille, et pénétrée aussi de la satisfaction intime de jouir, par à peu près, de cette vie princière qui avait été le rêve de toute son existence. Ce n’était pas que Mme d’Azas ne fréquentât et ne fît même fête à bien des femmes qui ne valaient pas Mme de Lacourselle, aussi bien sous le rapport de la distinction que sous celui de l’intelligence, mais elles étaient dans des positions de fortune à faire passer sur toutes leurs imperfections. L’argent appelle l’indulgence de certaines gens, et le grief principal et inavoué de la comtesse contre sa tante, c’était sa pauvreté. Elle en était un peu honteuse ; lorsqu’elle présentait à Mme de Lacourselle quelque personne de ses relations parisiennes, celle-ci, souvent, se hâtait de déclarer qu’elle aussi habitait Paris. Oh ! elle y vivait bien à l’écart, en son deui1 de veuve ; pourtant, si Mme X… était assez, aimable pour monter jusque chez elle, le lundi, 18 quatre à sept heures… Ces jours-là, la comtesse l’aurait battue ; et, lorsqu’on acceptait et promettait à Mme de Lacourselle d’aller la voir elle rougissait de confusion en pensant aux quatre étages que ses amis auraient à gravir pour arriver chez sa tante, et à l’escalier noir, sans tapis, qui