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RICHE OU AIMÉE ?

La haute vie battait son plein à Bloicy, et, depuis huit jours qu’iis y étaient installés, les d’Azas avaient bouleversé la calme et grandiose demeure. Dès le matin, on entendait piaffer, sous les fenêtres, les chevaux du comte ou ronfler le moteur des automobiles. A l’intérieur, c’était le va-et vient continuel des gens de la comtesse, qui sortait deux ou trois fois par jour, et faisait quotidiennement quatre ou cinq toilettes. Puis, comme elle entendait mener partout son grand train de mondaine, dès son arrivée, elle avait fait des visites de voisinage, lancé, de la part de sa mère, quelques invitations, en avait reçu d’autres, et c’étaient sans cesse des visiteurs ou des invités attirés par le mouvement, sinon la gaîté, de cette vie élégante qui, chaque année, venait, pendant deux mois, révolutionner ce petit coin de province paisible.

Parmi les « environs » de Bloicy, Mme d’Azas retrouvait quelques Parisiens, et c’étaient ceux-là qu’elle fréquentait le plus souvent et le plus volontiers, sans pourtant dédaigner les autres ; il lui fallait des relations à tout prix, et elle ne reculait devant rien pour s’en procurer.

Naturellement, les hôtes de Mme de Vauteur se trouvaient un peu entraînés dans le tourbillon qui était l’atmosphère habituelle de sa fille. Ils n’étaient pas de toutes les fêtes, mais le comte, qui aimait à emplir ses voitures, leur offrait souvent des promenades, et la comtesse les conviait au moins aux parties qu’elle organisait.

André, surtout, avait ses faveurs ; il lui plaisait d’être accompagnée de ce beau et élégant cavalier, qui lui faisait honneur. Gisèle eût eu aussi ses bonnes grâces, n’était sa mère ; mais Mme d’Azas ne pouvait souffrir sa tante de Lacourselle, ses manières un peu affectées et surannées, sa personnalité trop effacée, à laquelle il fallait bien donner la droite de sa voiture, et elle rougissait de l’économie par trop visible de certains arrangements de toilette. Gisèle, c’était autre chose ; un véritable objet de luxe que cette petite ; un rien la paraît, un bout de ruban, une fleur ; un chapeau de dix francs — une robe de coton et elle était