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la barre un peu impérieuse des sourcils très noirs, s’ouvrent deux grands yeux clairs, bleus ou gris, deux yeux de lumière, de franchise, de bonté, dont on sent la puissance attractive sans chercher à en savoir l’exacte nuance.

Pourtant, sur leur intensité de vie intellectuelle, si frappante, la mélancolie, aussi, jette un voile…

La vie est, pour d’aucuns, un difficile et parfois douloureux problème, et une fois de plus, dans cette fin de jour appelant la réflexion, Mme Tébesson cherchait la solution de la sienne…

La trouverait-elle dans les pages, encore éparses, qu’elle venait de tracer ? Quoique sans l’espérer, la pensée de les relire l’arracha à sa rêverie. Près d’elle était une petite lampe, elle l’alluma, et, s’inclinant sur les feuillets, travail de l’après-midi, elle les parcourut, sa plume à la main, ajoutant ici un mot, en retranchant là-bas un autre. Mais sa lecture, sans doute, ne la satisfit pas, car son front ne se déplissa point, et ses lèvres restèrent tombantes, dans une courbe de découragement.

Lorsqu’elle eut fini, de nouveau, elle repoussa le manuscrit, et loyalement, tristement, avec une absence d’orgueil, bien rare chez l’ouvrier si souvent épris de son œuvre, elle murmura :

« Ce n’est pas mal, mais… c’est toujours la même chose, et ce n’est pas encore ce livre-ci qui me conduira à la fortune… ou à la gloire !… »

Et, à ce dernier mot, une sorte de triste sourire vint effleurer sa bouche, comme devant d’illusoires et inutiles perspectives…

Pourtant ce livre, bien qu’il ne dût prendre aucun des chemins menant aux buts ambitieux, il fallait le terminer…

Et Mme Tébesson, encouragée par la lumière revenue, grâce à la petite lampe, reprit sa plume, malgré la fatigue évidente d’un après-midi de labeur que trahissaient, dans les dernières pages