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petite que Jeannine, elle était aussi rose que celle-ci était pâle ; ses cheveux étaient aussi blonds que ceux de l’autre étaient noirs, son maintien était aussi gracieux et souple que celui de Jeannine était noble, et, si la première éveillait la comparaison d’un lis, la vue de Gillette amenait immédiatement la phrase consacrée : fraîche comme une rose.

Mme Tébesson les interrogeait sur l’emploi de l’après-midi. On revenait du patinage, où une amie dévouée avait conduit les jeunes filles. S’était-on bien amusé ?

— Oh ! si bien, mère, disait Gillette, si bien ! C’était ravissant ! Il y avait un monde fou, la glace était excellente ! C’est Mme de Chasselas qui a offert le goûter. Elle nous a demandé d’en faire les honneurs avec sa fille Cécile. Il y avait du thé, du punch, toutes sortes de petits gâteaux. Après, on a organisé une grande farandole. Bref, il a fallu la nuit pour nous chasser.

Souriant à cette juvénile animation, Mme Té­besson regarda Jeannine.

— Et toi aussi, tu t’es amusée ? fit-elle.

— Oui, répondit la jeune fille, mais vous me manquiez. Vous savoir ici, enfermée avec votre fatigante besogne, alors que nous nous divertis­sions si gaiment… Cette pensée a gâté mon plaisir.

— Ma chérie, reprit Mme Tébesson, tu sais que le froid m’est contraire.

— Et que l’air vous est nécessaire, reprit Jean­nine. Il ne faisait pas froid aujourd’hui.

— Mais mon travail, tu le sais aussi, ne souffre pas de retard ; il faut que j’aie terminé ce livre d’ici deux mois.

— Je sais, fit Jeannine, que vous vous tuez pour nous, qui ne faisons rien, et que cela ne peut durer ainsi.

— Allons ! allons ! reprit Mme Tébesson gaiment, pas de grands mots ! Vous faites quelque