Page:Flora Tristan - Peregrinations d une paria, 1838, II.djvu/98

Cette page a été validée par deux contributeurs.
94

m’auraient sauté au cou pour me caresser, je n’y aurais pu résister. Je suis dur sur le champ de bataille, parce que là j’ai appris à l’être, et que c’est une nécessité ; mais, avec des malheureux qui souffrent et pleurent, je souffre et pleure aussi.

— Ah ! cousin, je vous reconnais à ces paroles, et je vous aime ! Althaus, vous n’étiez pas fait pour tuer des hommes…

— Florita, je n’ai cependant jamais été plus beau qu’à Waterloo, et là je tuais des hommes…

— Pour Dieu ! ne me parlez pas de votre Waterloo : ce mot me fait frissonner d’horreur ; je ne puis l’entendre sans être péniblement affectée. Vous disiez donc, cousin, que le père Baldivia est parvenu à faire venir vos conscrits tout seuls, sans user envers eux de contrainte ?

— C’est un fait très vrai ; il les nomme des Alexandre, des César, des Napoléon ; il leur parle en grec et en latin, et peut-être, entre nous, leur dit-il, dans ces langues antiques, qu’ils sont de fichues bêtes, des poltrons, etc., etc. ; car le diable m’emporte si un seul de tous les lecteurs du moine sait le latin. Entre autres belles phrases qu’il leur débite,