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ne suis plus rien…, sur moi qui suis morte… » En achevant ces mots, elle tomba sur son oreiller, porta ses mains en croix sur le sommet de la tête et poussa trois faibles cris. Sa sœur accourut, Escudero vint, tous s’empressèrent de lui prodiguer les soins les plus affectueux ; et moi debout, auprès de la porte, je considérais cette femme : elle ne faisait aucun mouvement, ne respirait plus, avait les yeux grands ouverts et brillants.

Le capitaine m’arracha à ce triste spectacle en annonçant qu’il fallait que les visiteurs songeassent à se retirer, parce qu’on levait l’ancre. M. Smith vint me reprendre, j’écrivis au crayon deux mots d’adieu à Escudero, et partis.

Comme nous allions monter en voiture, nous vîmes la Jeune Henriette qui s’éloignait de la rade. Je distinguai sur la dunette une femme enveloppée dans un manteau brun et les cheveux épars ; elle étendait le bras vers une chaloupe, en agitant un mouchoir blanc. Cette femme était l’ex-présidente du Pérou, adressant le dernier adieu à sa sœur, à ses amis qu’elle ne devait plus revoir.

Je rentrai chez moi malade. Cette femme m’était toujours présente à la vue : son courage,