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sarcasmes ont froissé tout le monde ; pas une personne qui n’ait été atteinte ; toutes ont été ridiculisées par ses plaisanteries.

Cette femme a réellement un talent très remarquable pour faire la charge des ridicules, des manies, de la démarche même des individus. Elle se contourne le nez, les yeux, boite, louche, bégaie, prend les tics, tout cela avec tant de vérité et de comique, que c’est à pouffer de rire. Comme on doit bien le présumer, l’exercice d’un semblable talent lui a fait d’implacables ennemis. Beaucoup de personnes font un long détour, afin d’éviter de passer devant la boutique de madame Denuelle, tant on redoute d’être pris par elle pour le sujet d’une de ses caricatures. Elle raconte avec autant de gaîté que d’esprit ; et sa conversation, extrêmement variée, est des plus amusantes. On l’accuse d’être despote dans sa maison, de traiter très mal son mari, d’être âpre, vilaine même avec ses locataires. Ces reproches sont fondés ; toutefois, pour être juste, il ne faudrait pas taire ses bonnes qualités, et on ne lui en accorde aucune ; elle en a, cependant. L’ordre, l’économie avec lesquels elle dirige sa maison ; sa vie sédentaire, laborieuse, sont des traits qui