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talité extrêmes envers tous les étrangers, fut pour moi plein d’attentions. Islay avait bien changé d’aspect depuis mon dernier séjour. Je ne fus, cette fois, invité à aucun bal. Nieto et ses valeureux soldats, pendant les vingt-quatre heures qu’ils y étaient restés, avaient tout ravagé : outre les réquisitions de vivres, des extorsions de toute nature avaient été commises par eux pour arracher de l’argent aux malheureux habitants. Cette bourgade était dans la désolation. Le bon Justo ne cessait de me répéter :

— Ah ! mademoiselle, si je n’étais pas aussi vieux, je partirais avec vous : les guerres continuelles qui déchirent ce pays l’ont rendu inhabitable : j’ai déjà perdu deux de mes fils, je m’attends à apprendre la mort du troisième, qui est dans l’armée de Gamarra.

Je restai trois jours à Islay, à attendre le départ de notre bâtiment, et je les aurais passés d’une manière assez triste, sans la société de M. Smith et des officiers d’une frégate anglaise mouillée dans la baie, dont il m’avait fait faire la connaissance. Je n’ai jamais rencontré, je me plais à le dire, d’officiers aussi distingués par leurs manières, leur esprit, que ceux de la frégate the Challenger ; tous parlaient français, et