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pour demander un passeport, on me répond : « Vous êtes monja…, épouse de Dieu ! vous devez demeurer à Santa-Rosa… » Si je veux épouser l’homme que j’aime, on me dit : « Vous êtes monja…, épouse de Dieu ! vous devez vivre à Santa-Rosa… » Oh ! damnation ! damnation ! je serai donc toujours monja !… — Et moi, répétai-je. tout bas, toujours mariée !

L’expression que Dominga mit à prononcer ces mots me fit frissonner d’épouvante ; son désespoir était poussé jusqu’à la rage ; la malheureuse tomba épuisée sur le sopha ; je ne cherchai pas à lui donner des consolations ; il n’en existe pas pour de pareilles douleurs… Je caressai ses cheveux ; j’en coupai une mèche que je garde précieusement. Infortunée Dominga ! combien je compatissais à sa peine !

Vers dix heures, on frappa à la porte : c’était le jeune médecin qui l’avait aidée à se procurer un cadavre de femme. Elle lui tendit la main et lui dit d’une voix émue : — Florita s’en va…, et moi….

— Et vous aussi, interrompit le jeune homme ; vous partirez bientôt ! Encore un peu de patience, et vous ne tarderez pas à voir ma