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temps encore, la main-d’œuvre sera plus chère ici qu’elle ne l’est en Europe ; vous n’avez qu’une faible population, et vous l’occuperiez à fabriquer des étoffes, des montres, des meubles, etc. ? Que deviendront alors la culture des terres, déjà si peu avancée, et l’exploitation des mines, que vous avez été contraints d’abandonner, faute de bras ?

— Tant que nous serons sans manufactures, les étrangers continueront à nous emporter notre or et notre argent.

— Mais, colonel, l’or et l’argent sont les productions du pays, et, plus que toute autre, elles perdraient de leur valeur, si vous ne pouviez les échanger contre les productions du dehors. Je vous le répète, l’époque d’établir des manufactures n’est pas encore arrivée pour vous : avant d’y songer, il faut d’abord faire naître dans la population le goût du luxe et des conforts de la vie, lui créer des besoins, afin de la porter au travail ; et ce n’est que par la libre importation des marchandises étrangères que vous y parviendrez. Tant que l’Indien ira pieds nus, se contentera d’une peau de mouton pour tout vêtement, d’un peu de maïs et de quelques ba-