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humaines organisées contre moi ; de sûreté, de sympathie nulle part. Oh ! mon père ! m’écriai-je involontairement, que de mal vous m’avez fait ! Et vous, ma mère !… Ah ! ma mère, je vous le pardonne ; mais la masse des maux que vous avez accumulés sur ma tête est trop lourde pour les forces d’une seule créature. Quant à vous, don Pio, frère plus criminel que ne le fut Caïn tuant son frère d’un seul coup, tandis que vous assassinez la fille du vôtre par mille tourments, je ne vous livre plus à votre conscience, car il n’a pas de conscience celui qui, comme vous, se prosterne soir et matin au pied de la croix, et soir et matin dément par ses actes les saintes paroles de ses prières. Les passions seules sont les dieux de sa foi : le dieu de la vôtre, c’est l’or. Ainsi, pour un peu d’or, vous déchirez mon cœur, vous portez le désespoir et la haine dans une ame que Dieu avait créée pour aimer ses semblables et s’élever jusqu’à lui par la méditation. Oh ! mon oncle, mon oncle, qui pourra vous faire comprendre l’étendue des maux que votre exécrable avarice me condamne à endurer ? Mais non, cet homme ne sent rien que l’unique bonheur de contempler son or. Eh bien ! m’écriai-je, dans un moment où je me sentais