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mais alors j’étais exaltée par l’héroïsme du peuple et ne songeais pas au danger ; à Aréquipa, je ne vis que les malheurs dont la ville était menacée.

Les dragons de Carillo, bien montés, ayant le drapeau du Pérou au bout de leurs lances, parurent subitement au sommet de la pacheta ; ils se précipitaient du haut de cette montagne au galop de leurs chevaux, dans le désordre le plus grand que la peur pût faire naître ; après eux, venaient les chacareros, montés sur des mules, des ânes ; puis les hommes d’infanterie, courant parmi les chevaux, les mules, et jetant leurs fusils, leur bagage, pour être plus agiles ; enfin, l’artillerie sur le derrière pour protéger la retraite : le tout était suivi par les malheureuses ravanas, elles portaient sur leur dos un ou deux enfants, chassant devant elles des mules chargées, et les bœufs, et les moutons dont Nieto avait voulu faire accompagner l’armée.

A cette vue, la ville poussa un cri ; cri horrible, cri de terreur, qui retentit encore dans mon ame ! Au même instant, la foule disparut ; les dômes ne présentèrent plus que leurs masses inertes ; le silence régna partout, et le lugubre