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des larmes sur le sort qu’elle s’était fait. Elle n’osa parler de son chagrin et de son ennui à sa famille, qui s’était si fortement opposée au parti qu’elle avait pris, et d’ailleurs à quoi cela aurait-il pu lui servir ? — Vous le savez, mesdames, ajouta ma cousine, tout regret est inutile : une fois entré dans une de vos retraites, on n’en sort plus.

Ici les trois religieuses se regardèrent, et il y eut un accord dans ces regards échangés à la dérobée, qui n’échappa à aucune de nous deux.

La malheureuse Dominga renferma ses chagrins dans son cœur, et, n’espérant de soulagement de personne, elle se résigna à souffrir, attendant de la mort la fin de ses maux. Chaque jour passé dans le couvent, que la religieuse ne considérait plus que comme sa prison, affaiblissait sa santé jadis si brillante ; une pâleur mortelle avait remplacé sur ses joues le vermillon qui donnait tant d’éclat à sa beauté, lorsqu’elle vivait dans le monde. Ses beaux yeux, devenus ternes, étaient enfoncés dans leurs orbites, comme ceux des pénitents épuisés par les austérités du cloître. Un jour, vers la fin de la troisième année, le tour de faire la lecture