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tager. Je n’ai jamais compris le bonheur qu’on trouve à faire naître un amour auquel soi-même on ne peut répondre. C’est une jouissance d’amour-propre à laquelle les êtres qui ne vivent que par le cœur sont insensibles.

Je n’étais pas sûre que M. Chabrié m’aimât ; mais, dans la crainte que cela n’arrivât, je crus qu’il allait de ma délicatesse de prévenir la naissance d’un amour que je ne pouvais ressentir.

L’absence de messieurs David et Miota me donnait un peu plus de liberté : les trois autres passagers ne comprenaient pas un mot de français, je pouvais m’entretenir avec M. Chabrié sans courir le risque d’être entendue.

Le soir, je montai sur le pont ; et, après m’être arrangé un divan sur une des cages à poules, je me mis à causer avec M. Chabrié.

– Cette nuit est bien belle, lui dis-je ; admirez la magnificence de la voûte étincelante qui couvre nos têtes. Aidez-moi donc à classer toutes ces brillantes étoiles que je vois pour la première fois.

– Mes connaissances en astronomie ne sont pas assez étendues pour que je puisse vous faire l’énumération des milliers d’étoiles qui scintil-