Page:Flora Tristan - Peregrinations d une paria, 1838, I.djvu/79

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tandis que le vieux don José, qui enfin pouvait se promener à son aise, maintenant que la maison flottante était en repos, jouissait, avec un air de délices, du bonheur inexprimable de pouvoir faire douze pas de suite sans risque de tomber. Le vieillard ne s’arrêtait que pour faire ses petits cigaritos en papier : de temps en temps il souriait en nous écoutant. Je m’aperçus de son sourire ; et, désirant connaître le fond de sa pensée, je lui demandai ce qu’il comptait faire à la ville.

— Mademoiselle, me répondit-il avec ce calme espagnol qu’il avait au plus haut degré, je me garderai bien d’y aller.

— Quelle indifférence ! don José ; vous êtes donc bien satisfait d’être à bord de ce navire où l’on n’a qu’un si petit espace pour se promener ?

— Non, mademoiselle ; je ne suis pas plus indifférent que vous à la vue de la terre ; mais seulement j’ai sur vous l’avantage de ma longue expérience, et je sais à quoi m’en tenir sur les agréments que présentent ces côtes et beaucoup d’autres où nous pourrons aborder avant d’arriver à Lima : je pense que ce n’est pas la peine de quitter le bord afin d’être beaucoup plus mal