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que les noms prennent souvent leur origine dans des circonstances bizarres qui n’ont pas, la plupart du temps, le plus léger rapport avec les choses que ces noms désignent. Ce qu’on nomme, au cap Horn, la Terre de feu ressemble à la Terre de glace ; mais celui qui la découvrit crut la voir en feu par je ne sais trop quelle illusion d’optique, et il la nomma telle qu’elle se présentait à sa vue. Ainsi Valparaiso (vallée du Paradis) reçut ce nom divin des premiers marins espagnols qui abordèrent dans sa baie ; ils eussent, après une traversée aussi longue et aussi pénible, nommé également paradis la côte la plus aride, le pays le plus affreux, dès lors qu’il répondait au mot terre. Oh ! la terre est, en effet, le paradis de l’homme ; mais à lui d’y planter la vigne et l’olivier, et d’en arracher les épines et les ronces.

L’aspect de cette terre toute noire, entièrement aride, a quelque chose de si monotone, qu’on se sent péniblement attristé. Toute la baie est entourée de rochers plus ou moins élevés, contre lesquels les flots vont se briser en mugissant. Au milieu de la baie s’avance, assez majestueusement, une haute masse de rochers arrondie en fer à cheval ; c’est sur la plate-