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nesse, j’avais tant aimé cet oncle, que mon imagination me représentait comme un second père, j’avais tant souffert lorsque ma mère m’avait dit : « Votre oncle Pio vous a abandonnée, » que je ne pensais jamais à lui sans ressentir la plus vive émotion.

Le 3 janvier, vers quatre heures de l’après-midi, je montai à cheval, accompagné de mon cher cousin Emmanuel, d’Althaus, du bon M. Viollier, mes trois intimes, et suivie d’une foule d’autres personnes, venant plutôt pour satisfaire leur curiosité que par intérêt pour moi ou par prévenance pour don Pio de Tristan. Nous nous dirigeâmes vers la belle maison de campagne que mon oncle appelle simplement sa chacra[1] : elle est située à une lieue et demie de la ville. Lorsque nous approchâmes de l’habitation, Emmanuel et Althaus prirent les devants pour m’annoncer. Peu après, je vis un cavalier venir à toute bride ; je m’écriai : voilà mon oncle ! Je lançai mon cheval, et dans un instant je me trouvai auprès de lui. Ce que j’éprouvai alors, je ne saurais qu’imparfaitement l’exprimer

  1. Ce mot n’est pas espagnol ; on s’en sert au Pérou pour désigner une maison des champs.