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celle des faubourgs, s’élève de trente à quarante mille âmes ; on peut considérer qu’elle se compose d’à peu près un quart de blancs, un quart de nègres ou métis, et moitié d’Indiens. Au Pérou, comme dans toute l’Amérique, l’origine européenne est le grand titre de noblesse ; dans le langage aristocratique du pays, on appelle blancs ceux dont aucun des ascendants n’est Indien ou nègre ; j’ai vu plusieurs dames qui passaient pour blanches, quoique leur peau fût couleur pain d’épices, parce que leur père était né dans l’Andalousie ou le royaume de Valence. La population libre forme donc trois classes provenant de trois races bien distinctes : européenne, indienne, nègre ; dans la dernière classe, sous la dénomination de gens de couleur, sont confondus les nègres et les métis des trois races. Quant aux esclaves, de quelque race qu’ils soient issus, la privation de la liberté établit entre eux l’égalité du malheur.

Depuis quatre ou cinq ans, il s’est opéré de grands changements dans les usages et habitudes du Pérou ; la mode de Paris y a pris le sceptre : il ne reste plus que quelques riches et antiques familles qui se montrent rebelles à son empire, vieux arbres que la sève abandonne et