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est parvenu se reflète dans tout. Les amusements du carnaval ne sont pas plus décents, à Aréquipa, que les farces et bouffonneries de la semaine sainte.

Il y a des gens qui, pendant toute l’année, s’occupent à vider des coquilles d’œufs, ils en font commerce ; quand arrive le carnaval, ils remplissent ces coquilles de diverses couleurs : rose, bleue, verte, rouge, et puis bouchent l’ouverture avec de la cire. Les dames se munissant d’un panier de ces œufs, et, vêtues de blanc, vont s’asseoir sur le dôme de leur maison ; de là elles s’amusent à lancer ces œufs sur les personnes qui passent dans la rue. Les passants, soit à pied ou à cheval, sont toujours pourvus des mêmes projectiles et ripostent à leurs agresseurs ; mais, pour rendre le jeu plus gentil, on remplit aussi ces œufs d’encre, de miel, d’huile, et quelquefois des choses les plus dégoûtantes ; plusieurs individus ont eu l’œil crevé à ce combat d’une nouvelle espèce ; on m’en a montré trois ou quatre à qui cet accident était arrivé, et, malgré ces exemples, les Aréquipéniens conservent pour ce jeu un goût de fureur. Les jeunes filles font parade des nombreuses souillures de leur robe et se montrent vaines de ces