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succession de mon frère ; mais il n’a pu rien faire, par suite de l’invasion de l’Espagne par les Français, qui l’obligea de se rendre sur le continent américain pour des affaires d’une très grande importance. C’est également par suite de cette même invasion que nous sommes restés pendant de longues années sans communications, et ensuite la guerre de l’Amérique nous a tellement occupés que nous ne pouvions songer à d’autres choses, dont la distance qui nous sépare rendait la conclusion difficile. Cependant, le 9 avril 1824, j’ai envoyé à M. Changeur, négociant à Bordeaux, des pouvoirs spéciaux pour parvenir à découvrir votre séjour, par l’intermédiaire de ses agents à Paris, et les biens que le défunt avait laissés. Je lui ai donné l’adresse de la maison qu’il habitait lors de sa mort. Avant et après l’envoi de ma procuration, je lui avais très particulièrement recommandé à plusieurs reprises de ne pas épargner la moindre démarche pour savoir si vous existiez, vous et madame votre mère. Je n’ai obtenu autre chose que de me faire porter en compte les frais inutiles des recherches faites à votre sujet, recherches dont les preuves se trouvent en mon pouvoir. Comment, après vingt ans à partir de la mort de Tristan mon frère, sans avoir de vos nouvelles ainsi que de votre mère, pouvais-je me figurer que vous existassiez encore ? Oui, ma chère nièce, c’est une fatalité qu’aucune des lettres nombreuses qui m’ont été écrites par madame votre mère ne me soit parvenue, lorsque la première que vous m’avez adressée m’est parvenue sans retard. Je suis très connu dans ce pays-ci, et les rapports entre ses côtes et les vôtres sont assez fréquents depuis huit ans pour qu’au moins une de ses lettres fût arrivée. Ceci