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pour tout bien qu’une chemise rose et un pantalon de toile.

– Eh ! capitaine, cela suffit au vrai matelot, qui fait son état par goût, qui ne vit que pour voir du pays ; et j’en ai vu du pays !

– Et cela t’a rendu bien plus riche.

– Capitaine, est-ce que le vrai matelot pense à devenir riche ?

– Allons, garçons, maintenant que vous voilà pansés et un peu appropriés, je vais vous envoyer de la soupe et un plat de la table : tenez voilà du chocolat et du tabac à chiquer, que mademoiselle Flora m’a donnés pour vous ; elle vous recommande de prendre votre mal en patience, et de lui faire demander ce qu’elle pourrait vous envoyer pour vous faire plaisir.

– Merci ! capitaine, merci ! Dites à cette bonne demoiselle que nous lui sommes bien reconnaissants pour son tabac : le tabac c’est l’ame du matelot. Capitaine, soyez tranquille, avant huit jours nous serons sur le pont.

Chaque fois que M. Chabrié revenait de voir ses malades, il me racontait les conversations qu’il avait eues avec ces hommes d’une nature à part. Il faut avoir vécu parmi les matelots, s’être donné la peine de les étudier pour pouvoir