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Horn ils n’ont souvent que leurs deux chemises de laine pour tout rechange, et le surplus de leurs hardes à l’avenant. Ah ! c’est là que j’ai vu, dans ce qu’ils ont de plus horrible, les maux qui peuvent tomber sur l’homme. J’ai vu des matelots dont la chemise de laine et le pantalon étaient gelés sur eux, ne pouvant faire aucun mouvement sans que leur chair ne fût meurtrie par le frottement de la glace sur leurs membres engourdis par le froid. Les cabanes où ces malheureux avaient leurs lits étaient remplies d’eau (comme d’ordinaire cela arrive dans les gros temps au gaillard d’avant des petits navires), et ils n’avaient pas d’autre lieu pour se reposer. Oh ! quel douloureux spectacle que de voir des hommes réduits à un tel état de souffrance !

Le ministre de la marine pourrait prévenir les malheurs qui résultent du dénuement du matelot, en obligeant les commissaires de marine dans les ports à passer, conjointement avec les capitaines, la revue des hardes avant l’embarquement. Les règlements seront toujours impuissants tant qu’on ne pourvoira pas aux moyens d’en assurer la rigoureuse exécution. À bord des bâtiments de l’État, les hardes du matelot sont l’objet de fréquentes revues : on