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cap. Nous le passâmes par les 58°, et dans les mois de juillet et août, ce qui nous donna de 8 à 12° de froid. Nous eûmes passablement de neige, de grêle et de glace.

Ce fut là que nous éprouvâmes une seconde série de misères. La mer, dans les parages du cap Horn, est constamment épouvantable. Nous y rencontrâmes presque toujours des vents contraires ; le froid paralysait les forces de notre équipage, même de nos hommes les plus forts. Nos matelots étaient tous jeunes et vigoureux ; cependant plusieurs eurent des clous, d’autres se firent beaucoup de mal en tombant sur le pont. Il y en eut un qui se laissa tomber du mât de hune sur le cabestan et se démit l’épaule. Ceux dont la santé résistait étaient écrasés de fatigue, par la nécessité de faire la tâche de ceux qui se trouvaient hors de service. Pour comble de maux, ces malheureux matelots n’avaient pas le quart des vêtements qui leur eussent été nécessaires. L’insouciance que donne aux matelots leur vie aventureuse fait que, lorsqu’ils partent pour un long voyage, ils ne pensent guère à se munir des vêtements indispensables pour se garantir du chaud et du froid ; il arrive quelquefois qu’à la ligne ils manquent de vêtements légers, et qu’au cap