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après eux les traces de leur course en longues fusées de lumière phosphorique qui éclairaient de vastes espaces de la mer : puis arrivait l’heure du lever de la lune ; sa clarté envahissait peu à peu l’empire de la nuit ; les brillants diamants rentraient dans le fond de l’abîme, et, pénétrés des rayons de l’astre, les flots, éblouissants de reflets, scintillaient comme les étoiles au firmament.

Combien de délicieuses soirées n’ai-je pas ainsi passées, plongée dans la plus douce rêverie ! M. Chabrié me parlait des peines dont sa vie avait été traversée, mais surtout de la dernière déception qui lui avait si cruellement brisé le cœur. Il souffrait, et la similitude de souffrance établissait, même à notre insu, un rapport sympathique des plus intimes. Chaque jour M. Chabrié m’aimait davantage, et chaque jour aussi j’éprouvais un bien-être indicible à me sentir aimée de lui.

Vint le cap Horn, avec toutes ses horreurs. Il a été l’objet de trop de descriptions pour que je ne me croie dispensée d’en parler longuement à mes lecteurs. Qu’il leur suffise d’apprendre que la température varie de 7 à 20° de froid, selon la saison et la latitude par laquelle on double le