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bord, garantie à la fois du soleil et de la pluie.

M. David m’avait prêté des bottes : M. Briet s’était privé de sa grande capote en peau de poisson pour me la prêter. Cette capote, faite en Chine, du plus beau travail, était imperméable et excessivement légère. M. Chabrié m’avait donné un grand chapeau ciré également imperméable. Ainsi affublée, j’étais, nouveau Diogène, logée dans mon tonneau, faisant de tristes réflexions sur la condition humaine. M. David, qui a un secret à lui pour supporter le chaud et le froid avec la même sérénité, était toujours leste, gai et bien mis. Tous ces messieurs n’avaient que leur chemise et leur pantalon. M. David seul avait une cravate, des bas et une veste en toile blanche ; lui et notre cuisinier[1] étaient, chacun dans sa sphère, l’ame du navire. Rien ne pouvait les abattre. M. David avait mille prévenances pour nous : il nous faisait rafraîchir de l’eau dans des bouteilles qu’il tenait dans la mer, il nous préparait de la limonade avec les

  1. Quand il vint se présenter pour servir dans sa profession pendant le voyage, M. Chabrié lui fit observer que le métier de cuisinier, à bord, était très pénible, il répondit : « Capitaine ! soyez tranquille je connais mon affaire, et d’ailleurs, pour moi, la mer est un élément. »