Page:Flora Tristan - Peregrinations d une paria, 1838, I.djvu/115

Cette page a été validée par deux contributeurs.

possible de confier à aucune d’elles ce soin sans courir le risque d’être empoisonné.

— Vous les traitez donc bien durement pour qu’elles ressentent autant de haine et nourrissent une pareille animosité contre leur maître.

— Je les traite comme il faut traiter les nègres, si l’on veut s’en faire obéir, à coups de fouet. Je vous assure, mademoiselle, que ces coquins-là vous donnent plus de peine à mener que des animaux.

— Combien en avez-vous actuellement ?

— J’ai dix-huit nègres, vingt-huit négresses et trente-sept négrillons. Depuis deux ans, les négrillons se vendent très bien, mais on a beaucoup de peine à se défaire des nègres.

— À quoi occupez-vous, tout ce monde ?

— À cultiver ma ferme, à soigner ma maison ; tout est très bien tenu, demandez à ces messieurs.

M. David m’a dit que vous étiez marié : êtes-vous heureux en ménage ?

— J’ai été obligé de me marier avec une de ces négresses, afin d’assurer ma vie : j’avais déjà été empoisonné trois fois, je craignais d’y passer, et j’ai pensé qu’en me mariant avec une de ces femmes, elle prendrait intérêt à moi, surtout