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LES COULISSES DE L’ANARCHIE

tout portés au lendemain de la victoire pour présider à la réorganisation sociale.

— Non, je vous dis, on nous l’a déjà faite !… Quand nous aurions flanqué le bourgeois par terre, ces lascars-là se réuniraient en gouvernement, en comité central, en je ne sais quoi qui se substituerait à l’autorité et déciderait de tout à l’abri de la force armée… Et ils deviendraient aussi rosses que les autres.

— Pourtant tu es anarchiste ?

— Pardieu !

— Et ton idée ?

— L’action individuelle. Chacun pour soi. Comme ça au moins on ne se connaît pas ; on ne s’invente pas des bons Dieux !…

Donc l’anarchiste ne marche pas. Alors quoi ? Il n’est ni assez instruit ni assez désintéressé pour philosopher sur son propre cas. Il voit le mal social et croit à un état meilleur. Il a la foi. Il croit, dans le sens le plus ardent et le plus étroit du verbe croire. Les temps viendront. Mais comme tout lui est obstacle : le prêtre qui l’a discipliné et lui a enseigné une résignation qui est une duperie et qui se trouve en outre contradictoire aux théories des socialistes pères de l’Église, le nombre qui l’a dédaigné, le bourgeois qui l’a exploité, le député bonapartiste et le député républicain qui n’ont rien fait pour lui, la propriété dont il n’entrevoit point la transmission, la loi qu’il est censé avoir dictée au législateur délégué par son bulletin de vote, l’armée