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MONOGRAPHIE DE L’ANARCHISTE

tice, beaucoup de messieurs en liberté lui paraissaient de bien sombres canailles.

En effet ce malheureux, bon ouvrier, bon fils, bon époux et bon père, n’avait qu’un défaut. Une ou deux fois par an, il s’enivrait, et alors, sans raison, sans motif, sans l’ombre d’un prétexte, il courait donner un soufflet au premier sergent de ville rencontré dans la rue. Le lendemain de ces petits accès, il déplorait tout le premier sa brutalité, s’adressait les reproches les plus durs, serrait le sergent de ville sur son cœur en pleurant… et passait en police correctionnelle. Si bien qu’il avait subi huit condamnations et passé près de cinq ans en prison sans avoir jamais commis une action malhonnête.

De même, dans l’anarchie, beaucoup de repris de justice sont de bons et loyaux citoyens. J’en sais un, le père Elisée Dépasse, qui a passé dix-huit ans en prison en vertu de quarante-huit condamnations pour vagabondage. Dix-huit ans de prison ! Et Depasse n’a jamais ni volé, ni escroqué, ni violé, ni incendié, ni tué, ni commis aucune des actions qui peuvent déshonorer un homme. Dix-huit ans de prison, pêle-mêle avec les filous, les escarpes et les pédérastes, pour un délit auquel nous pouvons être tous exposés du jour au lendemain, puisque, aucune loi n’obligeant les propriétaires à louer leurs immeubles, il suffirait d’une grève générale de la propriété pour nous réduire au vagabondage et nous faire tomber sous le coup de la loi !

Mais à côté de ces braves gens le parti renferme