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LITTÉRATURE ORALE

Le diable était aux aguets ; il se présente. — Tu as besoin d’argent, lui dit-il, j’en ai à ta disposition, seulement je ne le donne pas pour rien. — À quel taux prêtes-tu ? — Tu n’auras pas à me le rendre. Signe-moi seulement ce papier de ton sang, et il lui présentait une feuille toute préparée. — Mais c’est mon âme que vous voulez, dit le moine après avoir lu. — Je te donne dix ans ; pendant ce temps tu auras de l’argent à ton gré. Signes-tu ? Le moine signa, le papier et l’interlocuteur disparurent, mais il y avait un sac d’argent sur la table.

Le moine remit au seigneur ce qu’il demandait, et, le châtelain parti, la joyeuse vie reprit son train au manoir de Réville. Le moine se proposait bien d’attraper le diable : la dernière année, il se convertirait, il ferait pénitence, il prierait la sainte Vierge de s’intéresser à lui, et le pacte serait retiré des griffes du malin. Le diable était plus malin que lui. Au bout de cinq ans, jour pour jour, il reparaît. — Je t’attends, lui dit-il. — Vous m’avez promis dix ans ! — Je te les ai donnés. En enfer les nuits comptent pour des jours. Tu es théologien, et tu ne sais pas cela ! suis-moi.

Le moine eut beau protester, le diable l’em-