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mon sillon.

Damper, et son esprit captivait. Or il n’aimait rien tant qu’à faire parade de son esprit plus brillant que profond, plus fin qu’élevé. Son orgueilleuse nature n’admettait jamais l’effacement. Dans une société d’hommes, il tranchait sur la masse par la vivacité de son intelligence servie par un aplomb imperturbable et une très-grande facilité d’élocution ; devant les femmes quelles qu’elles fussent et quelque modéré que fût son désir de leur plaire, il se montrait gracieux, empressé et toujours spirituel. Il avait tout un arsenal de regards éloquents, de phrases adroites, de compliments voilés, qui le rendaient fort agréable ; il savait parler et se taire, paraître à propos et disparaître pour se faire désirer, et puis, l’effet produit, sa supériorité imposée et reconnue, il n’y pensait plus.

Il avait été pour la pupille de son patron ce qu’il était pour toutes les femmes ; mais Fanny dans son ignorance profonde du monde avait subi sans défiance, sans arrière-pensée, avait pris au sérieux son amabilité banale. C’était avec une joie bien franche qu’elle voyait venir de loin les jours désignés à l’avance, où son tuteur lui disait : « Il faudra mettre demain un couvert