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mon sillon.

courses de ménage, ce fut tout. Elle était devenue grande et belle que personne, à Damper, n’avait paru s’en apercevoir, et, de cette jeune fille sérieuse, d’une timidité farouche, personne ne s’était rapproché.

Jusque-là elle avait peu souffert d’un isolement qui était entré dans ses habitudes ; mais dans ces pénibles jours il lui parut amer d’être seule, et l’isolement s’appela pour elle d’un nom plus triste : abandon.

Quand, l’enterrement fini, elle rentra dans son appartement, elle repoussa loin d’elle la petite table couverte des instruments qui servaient aux travaux féminins, occupation de la plus grande partie de son temps et, sans avoir le courage de changer de costume, elle s’assit d’un air accablé. Rien ne troublait le silence autour d’elle, on n’entendait que le bruit sec et régulier d’une horloge placée dans la chambre voisine qui était celle du mort. Chaque fois que le marteau de fer résonnait durement sur le timbre, Fanny tressaillait de tout son corps et puis pressait son front glacé de ses deux mains. Un moment, en relevant la tête, ses yeux plongèrent au-dessous d’elle sur la place. Elle recula vivement sa