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mon sillon.

ment de sa destinée qui est telle qu’il l’a, non pas désirée, mais préparée. L’ambition, le désir immodéré des jouissances, le manque d’énergie morale, ont perdu Charles ; le travail intelligent, la force patiente et ce qui sait accepter cette vérité : que le bonheur est nécessairement incomplet en ce monde, ont sauvé René.

Aujourd’hui, M. René Bonnelin est un riche et un heureux père de famille que tout Damper aime et honore et qui peut dire hardiment : j’ai tracé mon sillon dans la vie. Charles Després un être aigri, bourru, dont chaque parole est une critique amère d’un monde qu’il a pris en haine. À Damper, où le souvenir de son triste mariage s’est à peu près effacé, il est regardé comme le type accompli de ces vieux garçons à l’humeur chagrine qui ont pour manie de déprécier le genre humain, dont pourtant ils n’ont pas fait, tant s’en faut, l’honneur.

M. Després, ayant divisé sa fortune entre tous ses enfants pour éviter les querelles, Charles a fait bâtir un pavillon sur le terrain qui lui appartiendra à la mort de son père. Il vit là comme un ours, tout épris des travaux et des plaisirs cham-