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mon sillon.

où toutes nos bêtes sont encore à l’étable. Je me sens maintenant un goût particulier pour la vie rustique, simple, je dirai presque pour cette évangélique pauvreté. Non pour la misère dont le spectre s’est présenté à notre porte le jour où s’est enfui le banquier chez lequel était déposé notre patrimoine, mais pour la vie active, sobre, utile. Je m’intéresse à la santé de nos belles poules et de nos blanches brebis, je porte le plus vif intérêt à la pousse des légumes, je taille, je sarcle, je balaye, je lave, je mets la main à toutes les pâtes, excepté aux pâtes sacrées que pétrit Fantik avec tant de solennité. Les jours de marché je ne suis pas fâchée d’avoir la responsabilité de notre dîner et je transforme notre jolie cuisine en salle à manger pour être plus à même de servir mes deux chers vieillards.

C’est un de nos bons jours, un de nos petits jours de fête. Tu n’incrimineras pas, je l’espère, mon nouveau genre de vie, mon cher René. On peut devenir simple sans devenir vulgaire, que d’hommes puissants ont apprécié ce travail des mains, il y a des rois qui ont aimé à manier le ciseau et les grands Romains tenaient bien la queue de leur charrue. Pour une femme surtout