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mon sillon.

— J’en ai toujours eu le pressentiment, dit-il, d’une voix singulièrement émue. Charles nous échappera, il nous fera du chagrin.

Madame Després tressaillit et devint toute pâle.

— Marc, Marc, murmura-t-elle d’un ton de reproche.

— Que veux-tu, Marie, il m’inquiète.

— Ah ! tu as toujours jugé sévèrement ce pauvre enfant, dit la mère avec angoisse, et il s’en est bien aperçu.

— Il n’a pas pu s’en apercevoir. Quand je me suis montré sévère, c’est qu’il le fallait. Il a été un enfant triste, paresseux, raisonneur, taquin, mécontent. Ces défauts ont grandi et je crains beaucoup pour l’avenir.

— Mais il n’y a pas lieu de craindre. Depuis deux ans il va très-régulièrement à son étude et il ne parle plus de nous quitter.

— Non, mais il en a la pensée, rien ne peut m’ôter de l’esprit qu’il en a la pensée. Tout travail sérieux le dégoûte, il s’isole de ses frères, leurs distractions ne sont plus les siennes.

— Parce que ses goûts sont différents des leurs. Il est plus faible qu’eux, d’ailleurs, il l’a toujours été.