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mon sillon.

elle avait porté vaillamment le lourd fardeau des obligations maternelles, et, vieillie, épuisée physiquement du moins, elle disait : Déjà !

Ses doigts s’arrêtèrent, elle leva les yeux vers son mari, leur regard se croisa et, par un mouvement spontané, ils se tendirent la main en souriant. La main brune, velue et encore vigoureuse de l’époux enserra dans une affectueuse étreinte la main amaigrie de la douce et courageuse compagne de sa vie, et il reprit en s’appuyant au dossier de son siège :

— Nous avons fait, non sans peine, la grande partie du chemin, Marie ; mais, Dieu merci, ceux qui viendront après nous trouveront la route aplanie. On leur a mis l’outil dans les mains. À eux maintenant de tracer leur sillon.

— Les pauvres enfants sont pleins de bonne volonté, dit la mère avec une orgueilleuse tendresse.

M. Després hocha la tête.

— Pas tous, pas tous, je le crains, murmura-t-il.

Son œil gris alla chercher le jeune homme assis au fond du jardin, et, se retournant brusquement vers sa femme :