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mon sillon.

érigée à une grande mémoire. Je me rappelle que quand j’ai demandé sa destination à un passant, j’étais debout auprès d’une petite tombe grisâtre perdue sous l’herbe où était écrit le nom de Montmorency. Le tombeau allégorique de madame Raspail vous est aussi indiqué. Une femme complètement voilée passe la main à travers la grille d’un cachot. C’est l’âme de madame Raspail visitant son mari prisonnier.

Je suis resté longtemps par ces allées, écoutant le vent gémir dans les cyprès et sentant je ne sais quel froid m’envahir l’âme.

L’aspect de ces lieux où plane le sombre génie qui s’appelle le néant des gloires humaines, les pensées qu’il faisait naître m’émouvaient fortement. Il me semblait qu’un spectre échappé à ces étroites prisons de pierre ou de marbre versait goutte à goutte de l’eau glacée sur ce feu nourri d’ambition qui couve au fond de tout cœur d’homme en pleine possession de la vie. Un triste cortège m’a arraché à mes méditations. On a descendu devant moi, dans la fosse commune des pauvres, une bière qu’avaient suivie jusque-là trois personnes : deux femmes du peuple et un enfant de douze ans qui criait :