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mon sillon.

celui où ils se retrouvaient sous le toit hospitalier de la maison paternelle. Aucune sorte de comparaison n’avait pu enlaidir à leurs yeux ce vieux logis perdu l’été sous l’ombre épaisse de ses chênes trapus, et montrant l’hiver à l’entrée de la petite ville, dont il était comme la sentinelle avancée, son toit moussu et ses cheminées toujours fumantes.

Il y avait quelques mois, à la suite d’une indisposition assez grave, M. Després avait résigné ses fonctions de juge de paix. Le fardeau légèrement porté par l’homme de quarante ans était devenu lourd pour les épaules de l’homme de soixante, et la direction de ses travaux agricoles suffisait largement à l’emploi de ce qui lui restait d’activité. En ce moment il arrivait de la ferme dont les premiers bâtiments touchaient à l’enclos dans lequel avait été taillé le jardin potager, et il venait retrouver, dans la salle commune, sa femme qui y travaillait solitaire. Cette salle, comme tous les appartements de la vieille maison, avait de vastes proportions et était meublée avec une simplicité qui ne se rencontre plus. Des rideaux de calicot frangé opposaient leur tissu mat aux rayons du soleil qui avait toujours