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mon sillon.

Son immensité donne une espèce de vertige d’un nouveau genre. On s’y trouve perdu, englouti. Ailleurs on est quelqu’un, ici on n’est rien. Le sentiment que j’éprouve en arpentant ces rues, ces boulevards, c’est le sentiment profond de l’inutilité de ma présence. Paris n’a absolument besoin de personne, il n’a pas besoin de moi. Qu’est-ce qu’un être de plus parmi cette fourmilière d’êtres de tout format, de tout aspect, de toute nature ? Et ce sentiment d’où naîtrait je ne sais quelle tristesse et quel découragement intime, est devenu beaucoup plus intense quand je me suis approché de ceux en qui j’espérais trouver des protecteurs. J’en ai rencontré deux avant-hier, deux hommes affairés qui m’ont à peine regardé et qui n’ont pas eu probablement le temps de me jeter une parole d’encouragement. J’en ai vu deux autres hier qui ne m’ont pas laissé un plus consolant souvenir. C’est comme cela ici, il parait, je m’y ferai. Pour ces visites je n’avais pas manqué, suivant ta recommandation, de revêtir ce que j’ai de plus brillant dans ma garde-robe. Seulement, ma sœur, ce qui est brillant à Damper est parfaitement rococo à Paris. Un gavroche que