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mon sillon.

à Rennes en dépensant neuf cents francs par an, il avait laissé la chicane pour s’occuper d’agriculture. En se mariant, comme il était jeune et peu riche, il s’était fait nommer juge de paix de Damper et il avait vaillamment porté son double labeur. C’était un magistrat consciencieux et un cultivateur expérimenté. Il ne faisait point de l’agriculture en amateur, c’est-à-dire en y perdant beaucoup ; il payait de sa personne comme un fermier riche. S’il ne mettait pas la main à la charrue, il était là, dirigeant tout avec intelligence ; se méfiant, non sans raison, de l’utopie, mais toujours à l’affût pour saisir le progrès utile. Aussi, en quelques années, son domaine patrimonial, dont dépendaient de vastes terrains jusque-là incultes, avait-il doublé de valeur. L’ordre et l’économie avaient fait le reste, et sa fortune s’était notablement arrondie. Cela ne le rendait pas peu fier ; mais ce qui faisait par-dessus tout son orgueil, c’étaient ses six garçons, ses gars, comme il les appelait. Il était certain que la famille Després tranchait d’une manière saisissante sur la masse dampéroise ; on la regardait comme le type de la famille, digne encore de s’intituler patriarcale. Ce juge de paix de cam-