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le bouillonnement des marmites, et le crépitement du feu, et les ricanements des mauvais anges. Brrrou !… Vous sentez les cheveux, les poils et la chair roussis, les épaisses vapeurs de soufre et de goudron qui vous oppressent, et la puanteur de tous ces démons breneux et flatulents. Pûûû !… Cette infection que vous respirez vous remplit en même temps la bouche, et voilà pour le Goût. Pouah !… Quant au Toucher, vous éprouvez des brûlures sur tout le corps ; ajoutez-y la tenaille ardente d’un diable rouge, ou le bec d’un vautour qui vous dévore les entrailles. Aïe !… Voilà qui est assez simple, je crois ?… Après, examinez si la contemplation vous fut profitable. En ce cas, remerciez Dieu d’en avoir retiré l’horreur du péché et le plus grand désir de soustraire à Satan d’innombrables âmes que le Ciel s’était réservées.

Raton avait écouté la Sous-Prieure lui faire leçon et tenir ses discours spirituels tantôt sur un banc du jardin, tantôt dans le petit ermitage affecté à chaque religieuse et mis sous le vocable d’une sainte ou d’un saint. Cependant, les méthodes d’oraison, les préludes, les colloques, les résolutions n’étaient pas entrés dans l’esprit de la postulante, car Raton possédait la spontanéité des enfants, et, malgré les objurgations de Mère Marie-Thérèse de Saint-Augustin, qui ne pouvait rien à l’encontre d’un