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tenait que par la pointe de l’orteil. Je la volai, quelques jours après, dans le dessein de la mettre au pied enchanteur de Jeannette Rousseau… Jeune homme, la vue du pied de Mme Parangon dans son soulier de droguet blanc me porta aux extrêmes, je veux dire au viol, et cet objet de ma passion que je conserve sous globe, qu’on le mette dans mon tombeau !… Plus tard, la mule rose d’une jeune personne de la rue Montorgueil me fit écrire le Pied de Fanchette, qui eut cinq éditions, et dont le succès m’engagea de quitter l’imprimerie où je composais directement mes livres à la casse, sans les coucher sur le papier comme aujourd’hui. C’est un goût très ancien que celui de la chaussure, que je possède presque au même degré que celui de la taille fine. Son ancienneté me garantit contre l’accusation d’extravagance et de manie que mes censeurs et les « petits puristes » ne manqueront point de me jeter à la tête. Sais-tu que l’éclat du brodequin de la belle Judith éblouit Holopherne ? La courtisane Dorique, qui vivait au temps de Sapho, dont elle avait, dit-on, le frère pour amant, dut à son pied de séduire un roi, et de mériter une pyramide en guise de tombeau, ainsi que nous l’apprend Strabon, qui l’avait vue.

« Quelle charmante histoire que celle de la fortune de Dorique ! Elle prenait son bain sur les bords du Nil,