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de ne plus sortir, n’ayant pas d’amie, sinon la négresse Esther, qui remplissait les fonctions de femme de chambre, après avoir servi au nombre des Sulamites du Palais-Royal.

Quand Raton pénétra dans cette petite pièce, elle crut se retrouver à Balleroy, dans la chaumière de sa nourrice, et elle s’attendit à entendre roucouler les pigeons, comme ils ont coutume avant le crépuscule du matin.

— J’arrangerai bien tout cela, dit la Boiteuse, puisque la Mère nous a mariées. Ce sera mieux que chez les autres, et j’accepterai que l’on m’envoie des fleurs. Il y a des hommes gentils, surtout quand ils ne sont plus jeunes.

En parlant, elle avait retiré son tricot de soie et faisait paraître une opulente et laiteuse nudité.

— Je serai ta maman, reprit-elle, en attirant Raton, déjà dévêtue, contre une gorge qui aurait pu l’avoir nourrie dix ans sans tarir.

Raton ne refusa pas cette tendresse, où, dans son innocence, elle n’appréhendait rien de caché. Mais, habituée de se coucher tôt, elle s’endormit sur le côté, entre les seins de Nicole, gémissant d’être serrée si fort et priant faiblement sa compagne de ne plus remuer la cuisse qu’elle avait passée entre les siennes.

Elle s’éveilla qu’il n’était pas loin de midi. Encore