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elle. Le billet qu’elle tenait serré lui brûlait la main. Elle ne put résister à l’ouvrir, et elle lut :

Madame Gourdan,
Rue Saint-Sauveur,
chez le marchand de tableaux.

Raton ne savait qui pût être Mme Gourdan, mais elle se sentit d’autant plus résolue de l’aller voir qu’elle demeurait sous le vocable du Sauveur. Au moins n’y retrouverait-elle pas M. Poitou, qui exigeait le don de son corps, lui prenait une bonne part de son argent, et lui en donnait les raisons, tantôt dans le patois de la ville, qu’elle n’entendait point, tantôt par des coups qui rendaient ces raisons péremptoires. M. Poitou avait mis le comble à son infamie quand elle était revenue de chez M. Peixotte. Il l’attendait derrière la porte, au pied de l’escalier dérobé. Elle lui avait remis trois cents livres.

— Trois cents livres ! fit M. Poitou. Ça ne fait pas le quart du michon. C’est le stuque d’un mion de boule. Ou tu n’as pas su plumer l’ornie, ou tu me donnes le bouis en me prenant pour un loffe. Fonce-moi encore deux cents livres, sans quoi je te fais péter le maroquin, et je révèle tout à la daronne !

Et Poitou, une main levée, cherchait de l’autre à