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s’attacher aux Grecs seuls et de leur demander la vérité, sans accorder créance ni à nous ni aux autres hommes. Pour ma part, je vois qu’il en va tout autrement, Si l’on rejette, comme il convient, les vains préjugés, et Si l’on s’inspire des faits eux-mêmes pour être juste. [7]. En effet, j’ai trouvé que tout chez les Grecs est récent et date, pour ainsi parler, d’hier ou d’avant-hier : je veux dire la fondation des villes, l’invention des arts et la rédaction des lois ; mais de toutes choses la plus récente, ou peu s’en faut, est, chez eux, le souci d’écrire l’histoire. [8]. Au contraire, les événements qui se sont produits chez les Égyptiens, les Chaldéens et les Phéniciens - pour l’instant je n’ajoute pas notre peuple à la liste -, de l’aveu même des Grecs, ont été l’objet d’une transmission historique très ancienne et très durable. [9]. En effet, tous ces peuples habitent des pays qui ne sont nullement exposés aux ravages de l’atmosphère, et leur grande préoccupation a été de ne laisser dans l’oubli aucun des événements accomplis chez eux, mais de les consacrer toujours par des annales officielles, œuvre des plus savants d’entre eux. [10]. Au contraire, le pays de Grèce a essuyé mille catastrophes4 qui ont effacé le souvenir des événements passés ; et à mesure qu’ils instituaient de nouvelles civilisations, les hommes de chaque époque croyaient que toute chose commençait avec la leur ; c’est tardivement aussi et difficilement qu’ils connurent l’écriture ; en tout cas ceux qui veulent en reculer l’usage le plus loin se flattent de l’avoir apprise des Phéniciens et de Cadmos. [11]. Pourtant, même de cette époque on ne saurait montrer aucune chronique conservée dans les dépôts soit sacrés, soit publics, puisque, au sujet des hommes mêmes qui marchèrent contre Troie tant d’années plus tard, on est fort embarrassé et l’on fait force recherches pour savoir s’ils connaissaient l’écriture5. Et l’opinion prévalente c’est plutôt qu’ils ignoraient l’usage actuel des lettres. [12]. Nulle part d’ailleurs en Grèce on ne trouve un écrit reconnu plus ancien que la poésie d’Homère. Or, il est clair que ce