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les mains, et, pendant qu’elle est ainsi penchée sur la fontaine, une branche de l’arbre à peignes, derrière elle, s’abaisse tout doucement pour démêler ses cheveux au chignon. Elle se retourne, surprise, en tendant la joue droite.

Qui donc me prend là, par derrière ?… Continuez ! vous ne me faites pas mal.

L’arbre à houppes abaisse un de ses rameaux et la caresse de sa poudre de riz.

Oh ! comme c’est doux !… comme c’est doux !…

Elle tend la joue gauche. Même jeu de l’arbre à houppes.

Encore !… Mais ça me chatouille !… Assez !… J’ai envie de rire !… Ah ! ah ! ah !

L’arbre s’arrête.

C’est fini ?… Je vous remercie bien !…

Elle se lève.

Comment ?… Personne !…

Elle considère tous les objets autour d’elle, en marchant lentement.

La drôle de campagne !… Des peignes qui tiennent aux arbres ! En voilà un où poussent des perruques, et tous ces vêtements par terre, comme des feuilles mortes !… Ah ! la belle herbe, avec ces grosses gouttes de rosée. Mais non, ce sont des paillettes d’argent.

S’apercevant dans une des glaces de l’arbre à miroir.

Et cela ? C’est moi !… en diamants !… J’ai l’air d’un soleil !

Sa robe, arrachée, disparaît dans l’air.

Le vent !… Ah !…

Elle pousse un cri de terreur en s’apercevant en chemise et en jupon,
et croise ses bras sur sa poitrine.

Que devenir !… J’ai honte !…

Aussitôt, une des bandes d’étoffe, posées sur les collines du fond, arrive en ondoyant comme une rivière, et, se drapant autour d’elle, lui fait une sorte de tunique.